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Les probabilités, une place à part dans les sciences.

Les probabilités sont essentielles dans la modélisation statistique des données et pourtant il faut reconnaître que les probabilités occupent une place particulière dans le champ des mathématiques. <<Le calcul des probabilités ne me semble avoir été réellement, pour ses illustres inventeurs, qu'un prétexte commode à d'ingénieux et difficiles problèmes numériques... Quant à la conception philosophique sur laquelle repose une telle doctrine, je la crois radicalement fausse et susceptible de conduire aux plus absurdes conséquences... C'est la notion fondamentale de la probabilité évaluée, qui me semble directement irrationnelle et même sophistiquée: je la regarde comme impropre à régler notre conduite en aucun cas, si ce n'est tout au plus dans les jeux de hasard... Les applications utiles qui semblent lui être dues, le simple bon sens, dont cette doctrine a souvent faussé les aperçus, les avait toujours clairement indiquées d'avance.>> (Auguste Comte. Cours de philosophie positive, 27ème leçon 1844). <<Statistique n'est pas probabilité. Sous le nom de statistique mathématique des auteurs, qui, je vous le dis en français n'écrivent guère dans notre langue, ont édifié une pompeuse discipline riche en hypothèses qui ne sont jamais satisfaites.>> (Jean-Paul Benzécri, l'Analyse Des Données, 1972). Benzécri est l'inventeur de la méthode qui s'appelle l'analyse factorielle des correspondances (AFC) et le fondateur de l'école française d'analyse des données Ces deux citations montrent le scepticisme de certains auteurs, philosophes ou mathématiciens à l'égard de l'utilisation des probabilités. Le groupe de mathématiciens nommé Bourbaki, très important dans la redéfinition des mathématiques au vingtième siècle a superbement ignoré pendant très longtemps cette discipline. Les probabilités ne font pas non plus partie du cursus des élèves en classes préparatoires scientifiques, elles ne sont enseignées que pour les biologistes, vétérinaires, économistes, mais pas pour les élèves se dirigeant vers Polytechnique, les Mines, Centrale ou Normale Supérieure. Laurent Schwartz, dans son autobiographie <<Un mathématicien aux prises avec le siècle>> (Odile Jacob 1997) parle de ce phénomène d'exclusion des probabilités, il se trouve que son frère, Daniel Schwartz, est un des statisticiens les plus connus, un des spécialistes mondiaux de l'épidémiologie, et que Laurent Schwartz est le gendre de Paul Lévy qui fut un des probabilistes les plus importants de ce siècle.


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Joseph Saint Pierre
1998-11-24